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vendredi 22 février 2013
Pari perdu (2)
Voici trois ans et demi, j'avais consacré un billet à la chanson Paris-jadis qu'interprètent Jean Rochefort et Jean-Pierre Marielle dans le générique de début du film de Bertrand Tavernier, Des enfants gâtés. Soit dit en passant, je crois que c'est le billet qui a suscité le plus riche échange de commentaires sur ce blogue, grâce à l'érudition inépuisable de certain Anonyme Historique qui a hélas depuis longtemps déserté ces fichus parages — on avait dérivé vers une fructueuse confrontation de divergences relatives à quelques passages du Pont Mirabeau d'Apollinaire…
Bref, j'ai retrouvé le générique qui ouvre le film (merci, Ubi !), et le second degré de la chanson est bel et bien patent — c'est épatant !
Mais depuis, comme le notait déjà Debord deux ans seulement après la sortie de ce film, dans sa Préface à la quatrième édition italienne de « La Société du Spectacle », « la marchandise spectaculaire a été amenée à un étonnant renversement de son type de justification mensongère » : les néo-villes ne sont désormais plus hérissées de fer, de verre et de béton mais présentent le charme jaunement rieur des bourgades d'antan : rues piétonnes, immeubles proprets, parterres fleuris — il ne manque que des êtres réellement humains, mais c'est un détail, n'est-ce pas ? Et c'est ainsi que « le faux peut relever légalement le nom du vrai qui s’est éteint. » (ibid.)
À ce sujet, on lira avec profit le vigoureux opuscule récemment paru aux éditions 13 bis, Guide du XXe (arrondissement) pour le XXIe (siècle).
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Sur ce Paris-là, on peut visionner aussi la formidable introduction de "Série Noire" d'Alain Corneau.
RépondreSupprimerLà aussi, il ne manque de des "vrais êtres humains"
La chanson est vraiment chaleureuse.
Il vous en prie (dis, tu peux m'envoyer la version mp3 pliiiiz !!!)
RépondreSupprimerBaci !
Je n'ai pas déserté ces parages, cher George; simplement, je m'abstiens à peu près complètement de me manifester au monde extérieur.
RépondreSupprimerJe déroge exceptionnellement à cette ligne de conduite pour vous saluer, et pour dire tout le bien que je pense de ces Enfants gâtés: ils tranchent avec les autres films de Tavernier par un côté semi-improvisé très chaleureux et très touchant. Une manière remarquable de filmer la laideur urbaine de cette époque. Des acteurs formidables: Piccoli bien sûr, Christine Pascal, et Michel Aumont qui joue un personnage où il faut (me semble-t-il?) reconnaître Claude Sautet. Et la troupe du Splendid dans des petits rôles de voisins d'immeuble. Vraiment, cela mérite d'être vu.
Et la musique vaut le détour. Pas seulement cette formidable chanson-titre: il y a aussi une version instrumentale du thème, composé par Philippe Sarde, interprétée au sax par Johnny Griffin, et même une reprise jazz de la Sonnerie de Saint-Étienne du Mont de Marin Marais -- une quinzaine d'années avant Tous les matins du monde…
En DVD, ce film n'a été réédité que dans un coffret comprenant l'Intégrale de la filmographie de Tavernier: il en constituait le "bonus", c'était le seul à n'être pas vendu séparément. Pendant longtemps on pouvait en trouver sur Internet des exemplaires pas très chers (un excédent de stock de l'éditeur, sans doute). Ça n'a plus l'air d'être le cas, hélas.
L'affiche originale, signée Savignac, est une jolie allégorie de la séparation dans l'espace urbain dont quelqu'un fit jadis la Critique.
Portez vous bien,
——.
P.S. @Joseph Ponthus, et @ tous les amateurs: pour une version mp3 de Paris jadis, on peut aller sur le billet original ("Pari perdu") en lien au début du message, ou bien ici.
Aux dires de Tavernier, la chanson a été mise en boîte en deux prises seulement. Et c'est Marielle qui siffle à la fin.
En prime, voici encore la version instrumentale de Paris jadis et la Sonnerie de Sainte-Geneviève du Mont de Paris dans son instrumentation Philippe Sarde…
RépondreSupprimerPuis je redisparais pour quelques années.
Cher ami, le plaisir de vous retrouver ici-même, tout à trac, réchauffe bougrement mon cœur au sein de cette journée glaciale !
RépondreSupprimerMerci pour toutes ces précisions et ces liens (la dernière fois que nous avions conversé de ce film, lors du billet initial mentionné au début de celui-ci, vous ne l'aviez pas encore vu — et moi toujours pas, hélas), d'autant que je ne parvenais pas à remettre la main sur mon propre hébergement chez Divchère de la chanson !
Je m'empresse de récupérer l'affiche de Savignac — bien plus judicieuse en effet que la photo de groupe qui servira au final — pour l'intégrer dans le corps de ce billet-ci, et puis je m'en vais écouter les deux autres morceaux que vous avez pris la peine de télécharger à notre intention.
J'espère que vous n'êtes pas atteint de l'agoraphobie qui a longtemps paralysé Manchette et vous transmets toutes mes amitiés, en espérant évidemment que les années d'effacement dont vous parlez se réduiront à une période la plus brève possible…
Cher Joseph, je t'ai déjà renvoyé en privé le mp3, mais le plus simple est désormais de le télécharger grâce au lien obligeamment fourni par notre Anonyme.
Cher Julius, merci pour le rappel de la séquence initiale de Série Noire, que j'avais complètement oubliée (pas revu ce film depuis vingt ans, au moins) : je m'en vais essayer de la retrouver.
Cher George, cette chanson nous rapproche chaleureusement de vous en ce samedi 24. Sous la neige, en pensant à une phrase de Léo Ferré qui raisonne encore en nous, je pense à vous et à Ubi. La récente lecture d'un ouvrage d'Aragon, mêlant littérature et description de l'ancien Paris me tourmente l'esprit et je me reproche ne pas avoir visité votre librairie. Je relis votre billet du 1er mars 2010, 6 jour avant mon anniversaire et fait le vœu de passer d'ectoplasme numérique à individu réel en visitant votre antre (en compagnie d'une bouteille, pour ne pas paraître grossier). La toile n'est pas une fatalité (l'agoraphobie non plus), la vie est ailleurs.
RépondreSupprimerSamedi ou dimanche 24, l'alcool trouble les sens et le temps du mieux qu'il peut.
RépondreSupprimerCher William, vous serez toujours le bienvenu, mais ne tardez pas trop : non que ma cave se dégarnît, mais l'avenir de mon antre est rien moins qu'assuré…
RépondreSupprimerLe paysan de Paris est une excellente lecture, de même que tous les Aragon de l'époque : Le libertinage, Traité du style, Le con d'Irène.
Ne vous reprochez rien, en tout cas : il y a toujours mieux à faire !
Merci d'avoir rappelé ce billet du 1er mars 2010, que j'avais complètement oublié, mais je ne vois pas à quel vers de Ferré vous faites allusion, à propos de neige — ou bien s'agirait-il de la chanson Paname ?
bonjour,
RépondreSupprimerJe trouve ici des thèmes qui me sont chers, musicaux ou autres. En particulier cette chanson et ce générique que j'ai découvert il y a peu. Je n'ai pas encore pu voir ce film d'ailleurs. Sur le même sujet, je vous recommande le film de Jacques Rivette : LE PONT DU NORD (1981) qui filme un Paris défiguré et interroge l'avenir avec angoisse.
Bonjour Carole, et bienvenue dans ces marécages hasardeux (via La Plantación d'Alfonso, si j'ai bien compris).
RépondreSupprimerJe n'ai hélas pas vu ce Rivette (de lui, seulement L'amour par terre, je crois, un peu postérieur et tourné dans une maison incroyable qui a d'ailleurs servi de décor à d'autres films), pas plus que le Paris n'existe pas de Benayoun, au titre ô combien salivant.
Merci du conseil, en tout cas : je suis aux aguets.