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dimanche 23 décembre 2018

♪♬♪ Dallas, ton univers impitoyâââble… ♪♫♪


Dans le « Livre 1 » de son œuvre-fleuve Le Dossier M. (Flammarion, 2017-2018), Grégoire Bouillier livre une intéressante analyse de la barbarisation généralisée de l'économie politique mondiale à partir de la fin des années 70, dont la série télévisée Dallas figure selon lui l'emblème (pp. 221-238) :

« C’est pendant les années Dallas que les États se sont convertis les uns après les autres au libéralisme économique échevelé, à la financiarisation brutale des marchés, à la mondialisation ensauvagée du capitalisme, à la fétichisation hystérique de l’entreprise, aux actionnaires rimant avec tortionnaires, à la transformation de tout, absolument tout, en marchandises et, pour faire passer la pilule autant que pour doper les ventes, à la communication tous azimuts, à la médiatisation incitant à vivre toujours plus par procuration, à la fusion du politique avec le divertissement, ouvrant ainsi gaiement la voie à un monde toujours plus impitoyable. » (p. 226)




Incidemment, on lit ceci p. 235, qui n'est pas sans nous rappeler une antienne de l'ami Jérôme Leroy :

« Je ne dis pas que c’était mieux avant : ce n’était pas mieux avant. Certainement pas ! Mais c’est pire aujourd’hui et comment est-ce possible si ce n’était pas mieux avant ?
Comment est-ce possible ?
Est-ce parce que nous ne pensons plus avoir d’avenir qui ne soit sombre et effrayant, tandis que notre passé nous apparaît pourri jusqu’à l’os ? »

(Et je recommande chaudement de lire en ligne l'intégrale d'un premier jet de ce passage ici)

Du coup, allez savoir pourquoi, j'ai repensé à cet extrait du film Fight Club de David Fincher (1999), lui-même adapté du roman de Chuck Palahniuk de 1996…


(Advertising has us chasing cars and clothes, working jobs we hate so we can buy shit we don’t need.)

… et par esprit d'escalier à ce passage de Volem rien foutre al païs, de Pierre Carles, sorti huit ans plus tard (et déjà diffusé ici-même) :


vendredi 21 décembre 2018

État de trans…



Une devinette refusée par le comité des blagues Carambar :

Quel pays a la préférence des transgenres ?

jeudi 20 décembre 2018

Le retour de Guy Debord !



France Culture consacrait voici un an un nouvel épisode de Une vie, une œuvre à Guy Debord, quatre ans et demi après le précédent, et rarement émission dérogea tant à son intitulé.

♪♬♪ Ah mais, ça ne finira donc jamais ?… ♪♫♪



mardi 18 décembre 2018

lundi 17 décembre 2018

« Nous voulons des lieux pour habiter le monde »


C'est l'un des slogans de La Parole Errante, et c'était le thème du montage de détournements qui y a été présenté samedi 8 décembre.
On a doublé en direct, cinq non-comédiens autour d'un seul micro et trois musiciens-bruiteurs, le résultat est assez foireux mais l'expérience valait le jus.

Dominique a présenté la chose ainsi (c'est quasi inaudible) :



… et voilà le (euh… ahem !) résultat :

lundi 26 novembre 2018

« Un peu plus de solidarité, de fièvre ou de douceur »




Attendre ou provoquer, un court-métrage de Mathieu Quillet et Julie Romeuf adapté d'un texte signé « Un électron d'une intersquat (1995-2008 et plus) », Chroniques du pied de biche (quelques éclats de vie par effraction).

Mathieu Quillet a réalisé sur le même thème un long-métrage tout aussi secouant mais plus concret : Pied de Biche, sur l'histoire dijonnaise du squat des Tanneries et du quartier potager pirate des Lentillères.


Bande annonce de Pied de biche. 3min50. 2016 from mat on Vimeo.

dimanche 11 novembre 2018

Une idée fantastique


L'origine du monde, version années 1980

En matière de con, il continue à vivre dans un état qui ne s’est jamais démenti et n’a subi aucun raffinement sensible depuis qu’il avait quinze ans et ne pouvait se lever de son banc en classe sans cacher sa trique derrière son cahier à spirales.

Chaque fille qu’il voit s’avère (tenez-vous bien) pourvue entre les jambes — d’un con véritable.
Stupéfiant ! Époustouflant !

Il n’arrive pas encore à se débarrasser de l’idée fantastique que, lorsqu’on regarde une fille, on regarde quelqu’un qui possède, c’est absolument garanti — un con ! Elles ont toutes des cons ! Juste là sous leur robe ! Des cons — pour baiser !

Et, Docteur, Votre Honneur, quel que soit votre titre, peu importe semble-t-il ce que se tape en fait ce pauvre minable puisqu’il rêve déjà de la chatte de demain alors qu’il est en train de tringler celle d’aujourd’hui.


Philip Roth, Portnoy et son complexe (Portnoy’s Complaint, 1967), tr. fr. Henri Robillot, Gallimard, 1970, rééd.coll. « folio », 1991, pp. 142-143

Rory respected women in each and every way even the feminazis could wish for. He just could’nt help what the sight of them did to his brain.
He could be introduced to a Nobel-prize-winning female scientist who had eradicated an endemic disease in between senior government ministerial posts and publishing works of acclaimed poetry. He would cower before her intellect, be humbled by her achievements, be shamed by his comparative insignificance. But none of that would prevent him trying to picture what she looked like under her clothes, or cause him to avert his gaze if she turned just the right way to afford a glimpse between those second and third buttons. This didn’t diminish her standing in his eyes, did not detract from his awe, and did not mean he was reducing her to a sexual object. It was just that he could’nt pretend she wasn’t — as well as all those other things — a sexual object as identified somewhere deep and primal inside every straight male.
He knew some guys were better at filtering it out, numbing it or censoring it, but suspected also than he was more sensitive to this primal instinct than most. It was as though he was a kind of sexual empath, born with some carnal higher awareness, a more acute and sensitive means of tuning into the signals. If it was a crime, it was its own punishment, because there was no rest from it throughout the waking day.

Christopher Brookmyre, Be my Ennemy or, Fuck this for a Game of Soldiers, Little, Brown, 2004, rééd. Abacus, 2005, pp. 144-145 

jeudi 1 novembre 2018

Suzerainisme, affermage, vassalité… : des concepts pour comprendre notre époque



France Culture diffuse en ce moment à potron-minet les cours donnés au Collège de France par le juriste Alain Supiot au printemps 2014, ébouriffants d'intelligence et d'humour, sur le thème des figures de l'allégeance.
Témoin celui que j'ai entendu ce matin, intitulé La résurgence du gouvernement par les hommes :



(Anarchistes susceptibles, gare à vos oreilles sensibles ! Ça milite sec en sous-main contre la déliquescence d'un solide État-providence…)

lundi 15 octobre 2018

Plus jouissif que Guy l'Éclair,
plus moderne que Peter Pan :
Guy Peterman !




Lecteur attentif de cet intéressant ouvrage paru en mars dernier chez L'insomniaque, un certain Francis a signalé naguère ici-même qu'on pouvait y lire p. 323 cet extrait d'une lettre jusque là inédite que Daniel Joubert avait adressée à Pascal Dumontier le 19 novembre 1990 après la lecture de son étude fraîchement publiée, Les Situationnistes et Mai 68, théorie et pratique de la révolution (1966-1972) (Éditions Gérard Lebovici, 1990) :

« Du point de vue musical, je vous pardonne volontiers d'avoir ignoré les détournements de Guy Petermann [sic] et ceux du groupe Abattoir à domicile, puisqu'ils n'ont été publiés que sous forme de cassettes à diffusion très restreinte. »

Et Francis de demander alors si quelqu'un pourrait mettre à disposition ces rares détournements…


Ce nom de Guy Peterman ne me disait rien mais il se trouve que j'ai eu le plaisir de côtoyer le regretté Daniel Joubert et qu'il m'arrive encore de croiser certains des membres d'Abattoir à domicile.
Et puis voilà qu'un autre commentateur, Henry, signale ici le mois dernier que le tube des Gommard, Y'a du baston dans la taule ! (qu'on peut entendre entre autres sur l'album La belle, qui accompagnait une précédente publication de L'insomniaque, Au pied du mur), doit ses paroles à ce même Guy Peterman :



Je me renseigne un peu, j'apprends que ledit détourneur s'est définitivement fait la belle dans la force de l'âge en 1989, ayant poussé l'humour noir jusqu'à son seuil ultime en se foutant en l'air devant l'institut médico-légal de Paris — genre livraison à domicile, comme le fait justement remarquer l'amie Lola — mais qu'il reste en effet, sans doute, des enregistrements qui traîneraient dans des cartons poussiéreux, par exemple chez l'ingénieur du son de l'époque ou chez Pierrot, le guitariste des Gommard. Mais exhumer ces fragiles traces va demander du temps, surtout après tant de transbahutements, de déménagements en déménagements durant quatre décennies…
Cependant, alors que j'en suis encore à attendre des nouvelles d'enregistrements enfouis, Henry ne s'arrête pas là : il récupère auprès d'un des musiciens de l'époque un ensemble de quatre morceaux détournés par Guy Peterman et me l'adresse obligeamment en précisant :


« D’après l’un des musiciens de ces enregistrements faits au studio Saravah en 1974, on trouve Francis Lemonnier au sax, Michel Muzac à la guitare, Olivier Zdrzalik à la guitare basse. Ces trois musiciens ont fait partie du groupe de rock progressif Komintern (Le Bal du rat mort, 1971).
Le chanteur et le batteur sont inconnus. Guy Peterman donne la réplique dans le premier titre. »


Henry — qui ne manque pas de relever que Francis Lemonnier avait composé en 1973 certains des morceaux de Pour en finir avec le travail — a identifié les versions originales des trois premiers titres :

Syndicats Blues est détourné de Summertime Blues (Eddie Cochran, 1958)

Émeutes sur Watts, Motor City, Harlem, de I Can’t Control Myself (The Troggs, 1966)

Les flics arrivent, de Surfin’ Hootenanny (Al Casey & the K-C-Ettes, 1963, chanté en français par Johnny Halliday en 1969 sous le titre Les guitares jouent).

Et Jules (de Dans l'herbe tendre) a fini par trouver celle du dernier morceau, Quand je crache : His latest flame (Elvis Presley, 1961).

En attendant de prochaines exhumations…

mardi 2 octobre 2018

N'hésitons pas à nous mettre en Fred !


Du samedi 22 au dimanche 23 septembre, France Culture proposait une « Nuit rêvée » à Emmanuel Guibert.
Fondu entre autres de Fred Deux, l'artiste a choisi de faire rediffuser avant tout le « Surpris par la nuit » du 9 février 2001 que j'avais déjà donné à entendre ici en 2010 et derechef en 2014, mais les liens n'étant plus actifs, c'est l'occasion d'en reprendre une tranche !
On écoutera avec intérêt le premier entretien d'Emmanuel avec Mathilde Wagman, durant lequel il raconte sa découverte de Fred Deux et sa fascination hypnotique pour son œuvre sonore.

Je rappelle que l'intégralité des enregistrements personnels de Fred est disponible sur le site Les bandes magiques.



Ci-dessous, quelques clichés de l'intérieur de l'immeuble de Boulogne-Billancourt où Fred Deux a grandi de 1924 à 1941, et qu'il revient visiter en intrus en 1953 — selon ce qu'il raconte dans cette émission.
Ces photos datent de l'an dernier mais rien n'avait changé depuis, si ce n'est qu'il n'y a plus de porte à gauche au fond du vestibule pour descendre au sous-sol.
La cave a été aménagée en studio mais la locataire était en vacances ce 30 mars 2017 — ce pourquoi les volets sont fermés.


Au fond du vestibule, l'escalier descendant vers les caves et la porte donnant sur la cour.



Vue depuis le haut de l'escalier menant au couloir desservant les caves.
Ces marches, Fred les a arpentées des milliers de fois.



Vue depuis la cour.
À gauche, la porte qui se trouve au fond du vestibule, face à la porte sur rue.
À droite, les deux fenêtres qui donnent sur la cave, anciens soupiraux agrandis par le père.

samedi 15 septembre 2018

— Toc, cot !
— Qui est là ?
— Cot.
— Cot qui ?
— ♬ ♪ Cot qu'il y a, j'ai cru c't assez… ♬


Patience est sapience.

D'aucuns la croyaient abandonnée sur la plage d'un vinyle poussiéreux, mais voici qu'après vingt ans de silence public, la chanteuse du groupe mon chéri nous offre le bonheur d'un mini-album tout mitonné de ses doigts de fée :

dimanche 9 septembre 2018

Ballade en sol


Après Berlin 38, Les Free Martin, Les poissons solubles et Pincemi et Pincemoi, Henri et Guetch se retrouvent à nouveau dans une formidable formation : Hector Linitian, dont voici le premier titre — qui nous rappelle évidemment cette bonne blague qu'est le Concerto en sol mineur.

Quand on devient ver, forcément qu'on se balade dans le sol…
Et quel ténia ne chantonnerait-il pas le deuxième tube (digeste) de Manset, Il voyage en solitaire ?
Bon d'accord, au fond, Onan saurien, on s'en branle que cette semence tombe à terre tant que ça ne rend pas sourd …

Ce qu'on sait de source sûre, c'est que le premier vinyle de Berlin 38 vient de sortir tout chaud des presses et que c'est déjà un collector, même s'il ne sera en vente que le mois prochain  !





Mais est-ce à cause de Jean Seberg que Marc Seberg ?

« Bamberguement de bamberg dans le berg ! », s'écriait Léon dans le Cosmos de Gombrowicz.

lundi 16 juillet 2018

LGBT ? FLNC ? LAPD ?
LBLC !
Laissez bronzer les cadavres



Nous sommes le 16 juillet, qui ne tombe pas cette année un vendredi comme en 1971 mais peu importe : c'est l'occasion de saluer la splendide adaptation par Hélène Cattet et Bruno Forzani du premier roman de J.-P. Manchette-Bastid, sortie l'an dernier dans une indifférence hélas tout aussi splendide que celle de leurs premiers créateurs envers l'art et le spectacle, entre autres.


vendredi 15 juin 2018

Quand y'a plus d'jus, ça gaze !




Voilà des semaines que votre chauffe-eau électrique de 150 l. fuit par en-dessous, ça craint méchamment vu la proximité des câbles électriques.

Pour remédier le plus simplement au problème, vous avez d'abord enroulé une ficelle de coton autour de l'écrou par le filetage duquel l'eau s'écoulait, la faisant filer jusque dans la bonde de l'évier heureusement tout proche.

Mais au fil des jours, ça s'est mis à pisser de plus en plus grave : le maigre filet d'eau s'est transformé en jet continu, il a fallu prendre les choses à bras-le-corps.
D'abord la solution de base, en ce samedi où les honorables boutiques de sanitaires sont fermées : on coupe le jus, on vidange le chauffe-eau, on déboulonne la résistance, on l'extirpe pour coller dessus une bonne quantité de filasse et de pâte à joint…




Hop !, on reboulonne le tout, on rebalance la flotte…

Et merde, ça pisse toujours, et même encore plus !

Bon, attendons lundi pour changer le joint de bride de chauffe.

Après une très très très longue requête internouillo-téléphonique,  vous apprenez enfin que pour votre cumulus Chaffoteaux et Maury référence constructeur n°688710, ledit joint porte le numéro 60071829, et qu'il y en a de disponible à Paris chez Schmitt-Ney, 104 Bd Richard-Lenoir, juste en face du Bataclan de joyeuse puis sinistre mémoire. Youpi !

Vous foncez là-bas, mais il faut patienter une bonne heure, le temps qu'un client précédent et sacrément radin obtienne une remise amicale de quelques centimes.
Le joint coûte 5,56 €, vous raquez sans barguigner, vous rentrez fissa et réinstallez le tout  puis renvoyez l'eau (c'est vite dit, mais ça prend vachement de temps).

Catastrophe, ça fuit de plus en plus, et voilà que surviennent des craquements très inquiétants.
Gaspe !
Vous comprenez alors que c'est la mousse polyuréthane qui est en train de se gorger d'eau, ce qui signifie que la cuve est fissurée et qu'il faut carrément changer tout le bastringue.

Bordel de chiotte de merde à cul ! Va falloir casquer carrément plus et puis redéfoncer le mur porteur, vu que ce modèle de bécane obsolète est devenu chaudement introuvable (l'écartement vertical entre les pattes de fixations (noté B, sur le schéma ci-dessus), jadis de 50 cm, est ainsi passé à 80 cm, allez savoir pourquoi !), sans parler de la position du groupe de sécurité…

Mais bingo !
Voilà presque une semaine que vous travaillez à résoudre ce problème, vous êtes désormais armé pour survivre à l'apocalypse de votre temps.
Du coup, vous avez trouvé une solution qui gaze facile : un réchaud à butane, un serpentin qui passe de l'arrivée d'eau froide à la sortie d'eau chaude, et c'est reparti comme en 40 !



 (ah, je comprends enfin que le « D » de « Système D » signifie autant « Danger » que « Débrouille »…)

lundi 11 juin 2018

Lire Brookmyre, ça fait toujours un petit choc, holà !



Itérations laborieuses mais bariolées de rigolades, à tenter de lire le début du premier chapitre de Faites vos jeux ! (All Fun and Games until Somebody loses an Eye*, Abacus, 2005), tr. fr. Emmanuelle Hardy-Seguin, éd. de l'Aube, 2007 ; rééd. 2008, pp. 69-70 : « Voitures de sport et casinos ».
Un exemple flagrant d'absence totale de pédagogie.


* Le titre originel fait allusion à la phrase qui marquait l'ouverture des combats de gladiateurs dans les arènes romaines.
Dans un roman ultérieur de Brookmyre, un très très méchant héros se fera littéralement exorbiter un œil, avec ce commentaire de sa victime : « Out, vile jelly ! » (Shakespeare, King Lear, III, 7).

jeudi 10 mai 2018

Apprendre Parker (un prolégomène)



En 1962, Donald Westlake approche la trentaine, il en a marre de publier pour des clopinettes et à tours de bras du pulp érotique bas-de-gamme — souvent à quatre mains avec son pote Lawrence Block, sous le nom collectif d'Edwin West ou d'Alan Marshall —, il a réfléchi à l'essence du roman noir, il en issit (en germine, en exsude…) un personnage quintessentiel, l'intransigeant braqueur individualiste et irréfragable sobrement nommé Parker — qui n'est à sa façon qu'un ouvrier ordinaire, qui rapporte comme il peut sa solde à sa bourgeoise —, dont Westlake fournira pas moins de seize aventures en douze ans sous le pseudonyme de Richard Stark.

Mais c'est que très vite, bingo ! ça se met à marcher à fond, cette histoire.

Au point que Westlake engrange suffisamment de thunes pour se permettre de suivre sa pente naturelle, qui est de perpétuer la critique sociale amorcée par Hammett, Chandler, Goodis & consorts, tout en l'adaptant au monde de son temps — qui aurait certes préféré de loin en rire.

Mais contrairement à la plupart de ses contemporains,  Westlake/Stark n'est pas hargneux ni saumâtre : il se met à développer une veine humoristique à sa manière, par exemple avec le personnage de Grofield : un comparse de Parker apparu dès En coupe réglée ("Série Noire" n° 958) mais nettement plus rigolo, en comédien-gentleman-cambrioleur-dragueur.
Et c'est le début d'une étonnante schizophrénie littéraire sur laquelle j'espère revenir bientôt, sachant que les aventures de Grofield se clôtureront par Lemons Never Lie (Les citrons ne mentent jamais, "Série Noire" n° 1457)  alors que Stark avait publié peu auparavant The Sour Lemon Score (Un petit coup de vinaigre, "Série Noire" n° 1309).
L'acidité des citrons n'est pas forcément suave aux éditeurs…

Mais qu'importe ! Westlake lâche carrément la bride en 1970 lorsqu'il se rend compte que l'intrigue qu'il avait en tête pour l'aventure suivante de Parker (le vol archi-réitéré de la même pierre précieuse, The Hot Rock) s'avère trop loufoque au regard du sérieux du personnage : il faut en créer un autre, une sorte d'OVNI (Organisateur Volontairement Non-Identifiable), et ce sera John Dortmunder — tout aussi impénétrable que Parker, encore plus mal-luné et plus malchanceux mais qui se refuse pour sa part à toute effusion de sang — dont Westlake multipliera les péripéties jusqu'à la surabondance par-delà sa propre disparition.

En 1974, Westlake clôt avec un panache tout starkien la série Parker — dont la continuation ne présentait sans doute pour lui plus aucun intérêt financier ni littéraire — avec Butcher's Moon (Signé Parker, tr. fr. Janine Hérisson, "Super Noire" n° 23, Gallimard) : c'est un feu d'artifice où l'on retrouve la plupart des complices rescapés des précédents épisodes, pour récupérer un magot lui-même rescapable d'un épisode précédent  (Slayground, 1969 ; Planque à Luna-Park, tr. fr. J. Hérisson, "Série Noire" n° 1472, , Gallimard,1972).

Mais coup de théâtre, il rempile 23 ans plus tard, en 1997, avec Comeback, prélude à une sorte de boule de neige oulipienne — Comeback, Backflash, Flashfire, Firebreak, Breakout, avant l'ahurissante trilogie finale dont nous tenterons d'expliquer la prescience avant de mourir — et dont voici un extrait, pour la bonne intelligence duquel il faut savoir que Parker, après avoir dérobé dans un stade la recette faramineuse des prédications du Révérend Archibald, s'est trouvé plus ou moins contraint de rencontrer ce dernier en se faisant passer pour un agent d'assurances nommé John Orr.
Parker ne ment jamais à ses interlocuteurs,  ses réparties sont toujours à double-sens, et ce passage nous rappelle bigrement celui de la deuxième aventure de Dortmunder — Bank Shot, 1972 — dont M'sieu Pop nous gratifia naguère.

Ils s’assirent dans le canapé, disposé à angle droit près de la cheminée, vers laquelle le révérend jeta un regard renfrogné, en disant :
— Je voulais faire monter quelqu’un, pour qu’il allume un feu, mais je n’ai pas eu une minute à moi aujourd’hui. (Il gratifia Parker d’un sourire d’auto-apitoiement amusé.) Je trouve qu’un feu égaye une pièce, en toute saison. Vous ne croyez pas ?
— Si, si.
— En fait, dit Archibald, légèrement penché en avant, sur le ton de la confidence, je voulais vous parler de votre métier. On peut dire que vous êtes une sorte de policier en civil. Mais au lieu de travailler pour la police, vous travaillez pour les assurances.
— Oui, d’une certaine façon.
— Vous avez sans doute des contacts avec… le monde de la pègre, différents de ceux de la police.
— Je devrais, en tout cas, répondit Parker.
— Les gens comme vous, dans votre position, travaillent au noir parfois, me semble-t-il. N’est-ce pas l’expression qu’on emploie ? Travailler au noir ?
— Vous voulez dire, se faire payer par deux employeurs pour le même travail.
— Un travail légèrement différent, rectifia Archibald. Similaire, disons. Par exemple, vous êtes à la recherche de cet homme, mais si mes informations sont bonnes, il y avait au moins trois personnes impliquées dans ce vol au stade, plus sans doute une quatrième pour leur servir de chauffeur. Quand vous mettrez la main sur l’homme que vous traquez, car je suis convaincu que vous êtes un excellent enquêteur et que vous réussirez à le dénicher, à ce moment-là, il est fort peu probable que l’on retrouve l’argent du cambriolage sur lui.
— Peu probable, en effet, confirma Parker.
— Si vous pouviez vous charger, dit Archibald en regardant son interlocuteur au fond des yeux, de récupérer l’argent que l’on m’a volé, qu’il soit ou non en possession de cet homme que vous traquez, je vous en serais très reconnaissant.
— Ah oui ?
— Je vous paierai en liquide, évidemment.
— Ah.
— Et vous pourriez avoir… Comment dit-on dans votre métier ? Une provision ?
— On peut appeler ça comme ça.
— Disons mille dollars.
Se levant sans attendre la réponse, Archibald fit demi-tour et se dirigea vers le bureau où il téléphonait lors de leur arrivée. Par-dessus son épaule, il ajouta :
— À valoir sur les… 5 %, disons, de la somme que vous récupérerez. Soit environ 25 000 dollars, monsieur Orr, ou un peu moins.
Parker se leva à son tour. Il regarda Archibald ouvrir un tiroir du bureau, en sortir une enveloppe épaisse qui semblait remplie d’argent liquide, piocher quelques billets, et ranger l’enveloppe encore pleine dans le tiroir. Il glissa ensuite les billets dans une enveloppe frappée du logo de l’hôtel, et revint vers Parker avec un grand sourire, en tendant l’enveloppe.
— Un petit avantage de votre profession, dit-il. Peut-on appeler ça comme ça ?
C’était la première fois que Parker se voyait offrir un pot-de-vin pour retrouver l’argent qu’il avait lui-même volé.
— Appelons-ça comme ça, dit-il.
Il prit l'enveloppe et la glissa dans sa poche.

Richard Stark, Comeback, 1997, tr. fr. par Jean Esch, Rivages/Noir, 2001, pp.178-179

mardi 27 mars 2018

Le chemin de l'excès conduit au palais…


Dans ce qui est actuellement appelé « le procès Tarnac », la journée d'hier — lundi 26 mars 2018 — fut essentiellement consacrée à l'étude des scellés issus des perquisitions effectuées le mardi 11 novembre 2008 lors de la fameuse (mais guère fructueuse) « Opération Taïga ».

Ce jour-là la « bibliothèque partisane » de Tarnac fut délestée de nombre de livres n'ayant de rapport avec l'émeute, le chaos ou la subversion que par leur titre — tel Le principe d'anarchie. Heidegger et la question de l'agir, de Reiner Schürmann, ouvrage assez introuvable à l'époque et que les enquêteurs ont à la réflexion sans doute préféré revendre sur Amazon plutôt que de le verser dans la procédure.

Et ce même jour, à 500 km plus au nord, d'autres policiers sagaces tout aussi avisés de l'objet de leurs investigations ont saisi dans une maison de Rouen un DVD gravé intitulé Le grand détournement, qui ne traite en rien de sabotage* ni de ralentissement des flux ou de déviations inopinées mais qui quant à lui reste conservé dans les scellés (et demeure un judicieux film de montage).

Puisque la notion même de « détournement » semble à ce point suspecte aux yeux de la SDAT, de la police, de la justice, comment ne pas s'étonner de cet étendard publicitaire apposé aujourd'hui même sur la façade du palais de justice de Paris ?



* À propos de sabotage, on a appris ce matin que le spécialiste en caténaires de la SNCF, venu témoigner ce matin, demeurait à Clichy-sous-bois allée des Sabotiers.

vendredi 23 mars 2018

Au paddock, les barbouzes rient ?



 Hé oui, tout ça n'est pas bien carré alors ça branle dans le manche rond car nos lampes errent…

Ah, ce PV 104 qui joue à […], quelle joie :
C'était-y au-dessus ou en dessous de l'autoroute qu'ils sont passés, bougre de bon sang de bois ?!

En ce moment précis du vendredi 23 mars 2018, le tribunal, qui s'est « transporté sur place » (ce n'est pas une reconstitution et c'est rarissime : l'audience continue avec public et presse, mais pas dans l'enceinte du palais de justice : en rase campagne), se réchauffe dans la salle des fêtes de Dhuisy en attendant la nuit afin de vérifier les positions possibles des véhicules durant la nuit du 7 au 8 novembre 2008. Buffet offert par la défense et les parties civiles.


’tain ! qui y était pour t'inquiéter ?

mercredi 24 janvier 2018

Les membres les plus respectables
arrivent à pied par la Chine


Mystère supplémentaire : qu'est-ce qui peut bien attirer ainsi le regard acéré de l'énigmatique producteur-éditeur, par-delà le profil de la belle de jour ? Et pourquoi s'est-il coiffé de ce minuscule tarbouche ?

Une heure pour ne rien du tout apprendre sur Gérard Lebovici, fondateur de l'agence Artmédia et des éditions Champ Libre : un documentaire diffusé en deux parties sur France Culture les 13 et 14 janvier.