Nous pouvons et devons concevoir tous les corps de la nature en même manière que nous venons de concevoir le sang ; tous en effet sont entourés d’autres corps qui agissent sur eux et sur lesquels ils agissent tous, de façon, par cette réciprocité d’action, qu’un mode déterminé d’existence et d’action leur soit imposé à tous, le mouvement et le repos soutenant dans l’univers entier un rapport constant. De là cette conséquence que tout corps, en tant qu’il subit une modification, doit être considéré comme une partie de l’Univers, comme s’accordant avec un tout et comme lié aux autres parties. Et comme la nature de l’Univers n’est pas limitée ainsi que l’est celle du sang, mais absolument infinie, ses parties subissent d’une infinité de manières la domination qu’exerce sur elles une puissance infinie et subissent des variations à l’infini. Mais je conçois l’unité de substance comme établissant une liaison encore plus étroite de chacune des parties avec son tout. Car, ainsi que je vous l’écrivais dans ma première lettre, alors que j’habitais encore Rijnsburg, je me suis appliqué à démontrer qu’il découle de la nature infinie de la substance que chacune des parties appartient à la nature de la substance corporelle et ne peut sans elle exister ni être conçue.
Vous voyez ainsi pour quelle raison et en quelle manière le corps humain est à mon sens une partie de la nature.
Pour ce qui est de l’âme humaine, je crois aussi qu’elle est une partie de la nature : je crois en effet qu’il y a dans la nature une puissance infinie de penser et que cette puissance contient objectivement, dans son infinité, la nature tout entière, les pensées particulières qu’elle forme s’enchaînant en même manière que les parties de la nature qui est l’objet dont elle est l’idée.
Je considère en outre l’âme humaine comme étant cette même puissance de penser, non en tant qu’elle est infinie et perçoit la nature entière, mais en tant qu’elle perçoit seulement une chose finie qui est le corps humain : l’âme humaine est ainsi conçue par moi comme une partie de l’entendement infini.
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