J'ai tout oublié, un documentaire-fiction de Christophe Deleu et François Teste diffusé sur France Culture dans le cadre de l'émission Sur les docks le 23 juin 2008 . Une étrange histoire où se croisent l'amour, la mort et l'oubli complet :
J'aime bien lorsque Dorothée demande à Éric : « Tu ne savais pas qu'on se connaissait ? », et aussi quand le journaliste Jean Bello dit : « Elle, morte, et lui, amnésique, ça a pas été simple ! »
La fiche de l'émission mentionne certains films, de qualité diverse, mais cette histoire m'a surtout rappelé cette poignante romance de Michel Gondry, Eternal Sunshine of the Spotless Mind :
ainsi bien sûr que l'indémodable Total Recall :
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* Guy Debord, « Manifeste », Internationale Lettriste n°2, 1953.
** « Nul bonheur, nulle sérénité, nulle espérance, nulle fierté, nulle jouissance de l’instant présent ne pourrait exister sans faculté d’oubli », écrivait Nietszche dans La généalogie de la morale.
Et le contraire, finalement, serait Je t'aime, je t'aime de Resnais (sur un scénario de Sternberg). L'oubli, physiquement et métaphysiquement impossible.
RépondreSupprimerTiens, tiens, je croyais que vous aviez définitivement abandonné ce masque, happé par les vagues qui lèchent les rives de l'Atlantide…
RépondreSupprimerJe dois avouer que j'ai tout oublié (indépendamment du présent billet) de ce film-là, vu voici plus de vingt ans et qui m'avait immédiatement ennuyé, sans doute à cause de Claude Rich que je ne prise guère, trop falot. La collaboration entre Resnais et Sternberg était pourtant prometteuse, mais je préfère le génial délire de L'invention de Morel.
Cicéron déjà appelait de ses vœux, pour faire pendant à l'art de la mémoire, ou ars memoriae, codifié par la rhétorique, l'invention d'un art de l'oubli -- ars oblivionis...
RépondreSupprimer"Comme si nous avions en notre pouvoir la science de l'oubli", objecte Montaigne. La volonté n'a pas plus de prise sur la mémoire que sur le désir, hélas.
Hélas, en effet, de même que l'on ne peut s'empêcher de respirer les effluves d'inattendus miasmes ni d'éviter à ses tympans le bruit intempestif des coups de klaxon.
RépondreSupprimerMerci pour Cicéron, cher Anonyme : j'ignorais cela. Mais je ne pense pas que Nietzsche fût complètement dans le faux : on peut effectivement parvenir, à force d'entraînement, à transformer de véritables souvenirs en fictions, et vice-versa. Mais cet effort risque de mener droit à de graves problèmes de "santé mentale", auxquels il n'a hélas pas échappé.
Et à propos de citations, je suis en train de lire en ligne l'ouvrage auquel renvoie la note précisant l'origine de la citation de Debord : c'est un régal que je vous conseille, ainsi qu'à tous.
Tiens, quelle coïncidence, à la page 30 de cette étude : « L'oubli est notre passion dominante » !
RépondreSupprimerPourtant, "souvenons-nous, nous vivrons deux fois"...
RépondreSupprimerVous ferez une bien meilleure mémorialiste de FQG que moi, chère Florence !
RépondreSupprimerMais selon la morale nietzschéenne [eh oui !] de l'éternel retour, il nous faut agir comme si nous allions vivre non pas deux, mais une infinité de fois (exactement la même vie, s'entend)…
Là aussi, cher George.
RépondreSupprimerUne infinité de fois, ça donne le vertige...
Sinon, ce Resnais que je ne connais pas, me fait, à moi qui n'ai rien contre Claude Rich, bien envie.
Bon sang de bois, vous voyez bien !
RépondreSupprimerEt en plus, ces billets sont tout frais, pas comme s'il s'agissait d'antiquités…
Allez, ma mémoire se liquéfie en amnésie blanchâtre. Moi qui croyait me souvenir de tous les billets de Jérôme depuis le 25 janvier 2009 (et même bien avant, chez les Moissonneuses), je passe la main.
Tiens, je vais essayer de retrouver ce Resnais si proche dans mon souvenir de La Jetée, de Chris Marker, en beaucoup moins bien : il faut toujours revoir les films qu'on a trop vite méprisés dans sa jeunesse — comme Barry Lindon, à quoi j'ai dû me reprendre à moultes fois avant d'atteindre à l'émerveillement…
Oui, une infinité de fois : c'est justement ce vertige qui fait que chaque acte quotidien doit être décidé une bonne fois pour toutes. On est très proche de Sartre, là.
(Mais prenez une heure pour écouter le documentaire-moteur du présent billet, fichtrement bien fichu, je vous assure)
Bah, n’exagérons rien, je suppose que, comme la plupart des mortels, je retiens plus particulièrement ce qui me touche. « Se souvenir des belles choses », finalement. Parce que sinon, ces mille ans de souvenirs accumulés, hein…
RépondreSupprimer« La jetée », merci pour cette nouvelle référence. Voir et revoir, lire et relire, combien de vies ?
Sinon, je n’oublierai pas d’écouter le documentaire, promis.
On peut aussi essayer de se souvenir : Proust fait rien qu'à faire ça dans une recherche du temps perdu à coup de tasse de thé, de madeleines et de clochers ou d'aubépines. Mais "la volonté n'a pas plus de prise sur la mémoire que sur le désir, hélas", et ces moments magiques où le passé revient lui échappent complètement. Seul l'art, en l'occurence la fiction littéraire lui permet de les faire renaître. Comme dans un film de Resnais, décidément : Muriel. L'un veut oublier (le jeune homme tortionnaire retour d'Algérie), l'autre se souvenir (la quarantenaire qui croit revivre une idylle de jeunesse), les deux échouent : lui se suicide pour ne pas pouvoir oublier, elle constate que ses réminiscences ne sont que mensonges, fiction.
RépondreSupprimerun billet qui parle de Johnny Halliday et Sylvie Vartan, en somme.
RépondreSupprimerMerci, Wrob.
RépondreSupprimerAucune réminiscence non plus de Muriel dans ma tête-tourbe, hélas, mais heureusement je crois ne l'avoir jamais vu…
Le film que je me souviens avoir préféré de Resnais est Providence, sans qu'il ne m'en reste pourtant aucune trace, évidemment
wouah ah ah ah !
RépondreSupprimerOn dirait un herpès tentaculaire que cette encéphalite.
RépondreSupprimerArD