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mercredi 28 septembre 2022

Nie Nietzsche putschien !
(Alain, père hâtif, caguait torique)

 

Nietzsche se penchant sur son passé

Kant, ça va un temps, c'est hyper-pédagogique et ça gicle d'intelligence, mais bon, à la réflexion c'est un peu con-con, c'est laborieux, c'est même mortellement chiant, au fond !

Avec lui on en reste à l'école primaire, c'est que la première marche vers la raison fulgurante, vers le génie, vers l'époustouflance, c'est une grosse régression par rapport à cette putain d'autre pointure qu'est Spinoza.
Il manque un brin de poésie — sans même parler de surréalisme —, le père-la rigueur.

Et puis l'idéalisme, c'est tout bonnement mortifère et abrutissant : toujours les mêmes bondieuseries platonico-chrétiennes qui ont asservi tant de milliards d'êtres humains et ont conduit à en assassiner au moins autant (« la religion », que ça s'appelle — du latin religare…), mieux vaut oublier toutes ces conneries une fois qu'on les a déglouties.
Sans compter qu'après Kant il a fallu se cogner Kierkegaard et Heidegger, merdre !
Franchement, je préférais les doux poètes que Descartes a suscités (et qui le suçotaient) : Malebranche, Gassendi, et surtout Berkeley, ce génial fou furieux !

Bref, l'émission philo de France Khü se penche cette semaine non sans intérêt sur Nietzsche et ça m'a rappelé un truc.

On connaît les trois déclinaisons de l'impératif pratique catégorique kantien, « Agis uniquement d'après la maxime qui fait que tu peux vouloir en même temps qu'elle devienne une loi universelle », énoncées dans les Fondements de la métaphysique des mœurs (trad. Victor Delbos) :

— « Agis comme si la maxime de ton action devait être érigée par ta volonté en LOI UNIVERSELLE DE LA NATURE.

— Agis de telle sorte que tu traites l’humanité aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre toujours en même temps comme une fin, et jamais simplement comme un moyen.

— Agis d’après les maximes d’un membre qui institue une législation universelle pour un règne des fins. »

Mais après Kant vinrent aussi ces loufdingues de Schopenhauer (qu'était quand même assez sympa, bien que sans doute guère cool — surtout avec les meufs) et surtout de Nietzsche, qui lui réécrivit carrément l'impératif catégorique de manière nettement plus efficace et subjective, avec son amusante histoire d'éternel retour.
C'est par exemple au § 341 du Gai savoir, « Le poids formidable » :

Que serait-ce si, de jour ou de nuit, un démon te suivait une fois dans la plus solitaire de tes solitudes et te disait : « Cette vie, telle que tu la vis actuellement, telle que tu l'as vécue, il faudra que tu la revives encore une fois, et une quantité innombrable de fois; et il n’y aura en elle rien de nouveau, au contraire ! il faut que chaque douleur et chaque joie, chaque pensée et chaque soupir, tout l’infiniment grand et l’infiniment petit de ta vie reviennent pour toi, et tout cela dans la même suite et le même ordre — et aussi cette araignée et ce clair de lune entre les arbres, et aussi cet instant et moi-même. L’éternel sablier de l’existence sera retourné toujours à nouveau — et toi avec lui, poussière des poussières ! »
Ne te jetterais-tu pas contre terre en grinçant des dents et ne maudirais-tu pas le démon qui parlerait ainsi ?
Ou bien as-tu déjà vécu un instant prodigieux où tu lui répondrais : « Tu es un dieu, et jamais je n’ai entendu chose plus divine ! »
Si cette pensée prenait de la force sur toi, tel que tu es, elle te transformerait peut-être, mais peut-être t’anéantirait-elle aussi. La question : « Veux-tu cela encore une fois et une quantité innombrable de fois ? », cette question, en tout et pour tout, pèserait sur toutes tes actions d’un poids formidable !
Ou alors combien il te faudrait aimer la vie, et que tu t’aimes toi-même, pour ne plus désirer autre chose que cette suprême, cette éternelle confirmation !

Autrement dit, et pour faire bref :

Agis toujours de telle sorte que tu puisses vouloir réitérer éternellement ton action.


8 commentaires:

  1. Marche pas, ton truc, démon Dumême, puisque avant tu n'étais pas là. P'tit malin, va !

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  2. ???
    'tain, zyva, schizo, j'pige rien, là !

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  3. On ne redevient pas innocent. Dussé-je jouer le jeu du démon Dumême, ce ne serait pas la même vie puisque j'aurais conscience de cette répétition, ne serait-ce que parce que le démon (qui n'intervient là que pour cela) me l'aurait soufflé "dans la plus solitaire de mes solitudes" – "ma suprême solitude" (trad. Vialatte).

    Ce philtre-là par exemple, je le reboirais peut-être ; mais en me souvenant de l'ivresse qu'il m'a procuré. J'en jouirais par avance, pas comme la première fois, et au moment de vomir, je me souviendrais du soulagement subséquent. Les 2 février d'Un jour sans fin ne sont pas exactement les mêmes, ne serait-ce que parce que Bill ne se laisse pas faire.

    Le poids formidable – "le plus lourd" (trad. Vialatte) – pipe les dés. Le même ne revient pas. Pourquoi soit maudire, soit diviniser ce démon et ne pas s'en moquer ? D'ailleurs qu'est-ce qui fait que sa question pèse ? Mon propre passé ? À supposer que j'y pense. Ne suis-je pas, comme au matin d'un rêve ou d'un cauchemar, allégé du seul fait de l'envisager comme passé ?

    Je n'ai jamais saisi où voulaient en venir les commentateurs de cette notion d'Éternel retour qui l'ont interprété comme une sorte d'esquisse de – ou d'épreuve – morale. Je crois plus simplement que Nietzsche prend à témoin son lectorat quant à sa propre droiture, que contestent ses contemporains, qu'il cherche en lui des complices "dans sa suprême solitude".

    'Tain, début de mois, faut s'actualiser !

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  4. Ouf, merci de me le rappeler, j'avais zappé, ayé ! Et merci aussi pour ce développement : c'est tout de même un peu plus clair pour mon cerveau las.
    Et aussi pour le rappel du génial film d'Harold Ramis, qu'il faudrait se repasser sans cesse : jamais je n'avais fait le lien avec le §341 !

    En fait on est entièrement d'accord, mais nos perspectives ne sont pas les mêmes — et, désolé, je crois avoir saisir subjectivement mieux que toi l'objectif de Nietzsche dans ce texte.
    Il n'est pas du tout question de revivre à nouveau les événements à l'infini : la perspective est celle de l'impératif moral, exactement comme chez Kant (qui ne réclame nullement d'établir de quelcconques lois universelles) : il s'agit juste d'agir à chaque instant de sa vie comme si on devait éternellement agir ainsi, point-barre.
    En somme, l'équivalent de peser ses mots, ou de tourner sept fois sa langue dans sa bouche (chose pas facile, je te le concède). Mais dans ses actes de chaque instant, dans sa vie quotidienne.
    Ou alors j'ai rien pigé ?

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  5. Bref, à mon sens, ce que conseille juste là Nietzsche à son lecteur, c'est de veiller en permanence à être vivacement vivant.

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  6. Si tu as bien pigé, en tout cas comme moi, que le comme si est relatif à l'impératif catégorique. L'Éternel retour s'en voudrait même une parodie. Kant kiffe "la loi morale en moi", à tel point que c'est écrit sur sa tombe. Et j'agrée aux déclinaisons 2) et 3), pour autant qu'elles soient praticables. Mais c'est, là aussi, un comme si, que Nietzsche extrapole parodiquement à toutes les conséquences et à tous les antécédents de l'action dont il s'agit de reconnaître la maxime. Dans cette totalité ramenée à l'ensemble de mon existence, je me demande si son démon Dumême ne lorgne pas sur celui de Laplace, Dieu du nécessaire, maître absolu des déterminations universelles causales extérieures que Nietzsche importerait en moi, pour voir, pour les mettre en jeu. De ce point de vue, le mien, le § 341 serait plutôt une question adressée au lecteur : t'aimerais-tu assez toi-même ?, m'aimerais-je assez moi-même ?, pour ne pas considérer l'action et sa maxime isolément, mais aussi l'ensemble de ce qui en toi y a mené et en a découlé ? C'est pourquoi je ne lis pas le § 341 dans la perspective d'un impératif moral.

    Quant à la valeur morale de l'action. D'expérience, j'ai pu en faire de bonnes sans considérer aucunement une quelconque maxime, et de mauvaises en en considérant de justes. Je demeure sergioleonien (comptine romaine de son enfance) : "Un cardinal est mort/ Il a fait de bonnes choses/ Il en a fait de mauvaises/ Les bonnes, il les a mal faites/ Les mauvaises, il les a bien faites." C'est peut-être exagéré dans l'autre sens, et j'ai sûrement bien mieux vécu qu'un cardinal, mais ça laisse du mou.

    Kant en discute d'ailleurs lui-même les circonstances. Mais j'aime à le croire assez malin, in situ, pour savoir que le meilleur menteur dit qu'il ne ment jamais... Pour le savoir, et l'avoir même pratiqué. Si j'avais à me planquer, j'irai chez lui.

    De toutes façons, les discussions sont plus claires lorsqu'on évoque telle action dans tel contexte, etc. Il en est de meilleures que d'autres, et elles ne concernent pas seulement soi-même.

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  7. Damn'it, schizo, méfaits de l'internouille depuis que je suis encagé en 4G ou malédiction moinebleubite, je ne découvre ton commentaire qu'à l'instant, avec plus d'un mois de retard, gaspe !

    C'est d'autant plus dommage que tu formules exactement ce que je tentais (hélas trop confusément, je m'en aperçois illico !) d'exprimer moi-même ici-même : la parodie de Kant, la question sur l'amour de mon action présente, minute par minute.
    Ce que Baudelaire traduit bien plus pessimistement que Nietzsche par :
    « Avalanche, veux-tu m'emporter dans ta chute ? »
    Tss-tss.

    Je me souviens d'un fabuleux fou furieux prof de philo à Paris I (le fils d'Henri Alleg, à vrai dire) qui en 1994 avait consacré une année de cours à cette extravagante et douteuse citation paulinienne :
    « Mangeons et buvons, car demain nous mourrons » !

    Si tu en es d'accord, j'aimerais intégrer partie de ton commentaire dans le corps du billet ci-dessus.

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  8. Ok. Vas-y, intègre, mais ça peut jurer stylistiquement avec tous ces "je", qui ne m'appartiennent pas néanmoins.

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