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dimanche 22 mai 2016

Révolutionnaire, certes — et en diable ! — mais un cœur de roi



Pas souvent qu'on entend causer au poste d'Ernest Cœurderoy, et encore plus surprenant sur une radio d'État.

Cette émission-là fut diffusée le 14 juillet 1978 sur France Culture grâce aux bons soins d'Hubert Juin, qui invitait notamment Jacques Le Glou à l'occasion de la réédition chez Plasma de Hurrah !!! ou la révolution par les Cosaques, aux flonflons évidemment — chose inouïe jusqu'alors à la radio — d'extraits conséquents de l'album produit quelques années auparavant par le même Le Glou, Pour en finir avec le travail (volume 1).

Entendue avec jubilation dans la nuit du 19 au 20 mai, avant un très chouette Mardis du cinéma de 1996 consacré à James Stewart.

mercredi 18 mai 2016

Bégueule ou Spinoza ?
Un sabotage en beauté, en une ligne et demie


L'éminent Bernard Pautrat, grand hégélien devant l'Esprit — n'en déplaise à notre ami Le Moine Bleu — vire spinoziste peu après Pierre Macherey et concocte longuement une irréprochable traduction de l'Éthique — imposant par exemple le terme « affect » pour traduire affectus, mais malheureusement pas le terme « mental » pour Mens : il a conservé cet « Esprit » à tendance spirituelle qu'avait choisi Roland Caillois — à la suite d'André Guérinot — dans son exécrable traduction pour la Bibliothèque de la Pléiade.

Bref.

L'ami Pautrat peaufine sa traduction durant des années, savamment, de plus en plus spinozistiquement, aussi patiemment peut-être (toutes choses étant égales par ailleurs) que Spinoza polissait ses verres de lunettes.

Tout bien polissé, il publie en au Seuil en octobre 1988, dans la collection « L'ordre philosophique » alors dirigée par François Wahl, une magnifique énième traduction de Ethica, texte latin (Carl Gebhardt hrsgb., 1925) en regard.

Mise en page avisée, correcteurs sourcilleux (même pour le texte latin), toute l'édition baigne dans le conatus jusqu'à l'ultime scolie, celui de la proposition XLII de la cinquième Partie, p. [541], qui se termine hélas affreusement ainsi :


Ayant minutieusement étudié, j'imagine, au moins à deux reprises, les épreuves passées par les mains de correcteurs chevronnés, quelle n'a pas dû être l'affliction du sourcilleux traducteur à constater que la conclusion du chef d'œuvre — ainsi dépareillée — le flinguait complètement !

Du coup, urgence oblige et fait rare dans l'histoire de l'édition française des années 1980 — mais on ne va quand même pas tout réimposer ni pilonner, y'a du fric en jeu, même si c'est l'Éthique ! —, la maison d'édition a composé fissa et fait insérer (par de petites mains asiatiques ?) un erratum au bon endroit, et que voici :

Onze années passent, on arrive en 1999.

Cette magnifique traduction de l'Éthique est rééditée dans la collection « Points-essais », et l'éditeur (pas encore racheté par ces enflures de La Martinière, mais Claude Durand, sentait déjà sans doute le vent tourner), a consenti à un effort pour réparer la bévue de la première édition : d'accord, on reprend les plaques offset de 1988 et on recompose à l'arrache (comme au temps de la linotype, alors que la PAO l'a liquidée depuis longtemps) le dernier scolie, ce qui aboutit à ceci (on remarquera l'irrégularité typographique des trois dernières lignes) :



* * * * *

Je reproduis ci-dessous la belle « Note du traducteur » que Bernard Pautrat offrait en 1988 aux éventuels lecteurs...
 


 ... ainsi que l'« Avertissement » de la réédition de 1999, où il qualifie bellement l'Éthique de « prodigieuse machine-à-bonheur » :



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lundi 9 mai 2016

« Voici venu le jour en trop » ?
(pis !)












198
198[4]
19[9]8

Entropie, c’est fini


Bon, cette fois c'est vraiment l'ultime version — promis ! — et l'énième mais dernier enregistrement.

En guise de prologue
(sur l'air de « Dix anx plus tôt » de Sardou) :


Dans la jungl' de Calais
Y'a pas Henri Calet
Le piéton de Paris
Là-bas, l'aurait pas ri
Parfois il se promène
Mais les Prolégomènes
C'est l'affaire de Kant
C'est affreux comm' chez Dante
L'Enfer compte neuf cercles
D' quoi s' fair' péter l'couvercle
C' fut écrit vers Capri
Arrêtons, je t'en prie !

C'est parti pour la chanson
(sur l'air de « Capri, c'est fini ») :


Nous n'irons plus jamais
Chez ce petit libraire
Nous n'irons plus jamais
Le bail l'a trucidé
Nous n'irons plus jamais
Huysmans – non, les huissières ! —
Nous n'irons plus jamais
Cett' fois, l'est décédé…

Entropie, c'est fini
Et dir' que c’tte librairie a connu d' si beaux jours !
La bouquin'rie, c'est fini,
On n'en trouv'ra plus beaucoup alentour
Fini d'y ouïr de beaux discours ou d'calembours
On n’y savourera plus l'entregent
Plus d’ trésors, de trucs rares, de trouvailles d’un jour
Plus d’apéros joyeux, ça s’ra plus comme avant

Nous n’irons plus jamais
Sur le boul’vard Voltaire
Nous n’irons plus jamais
Le sort en en jeté [rrr...]
Nous n’irons plus jamais
Mêm' nous, les prolétaires
Nous n' lirons plus jamais
D'Nietszch' les fragments faussaires (et les fesses !)

Ils ne liront plus jamais
Même les forts en thème
Mêm' des succès damnés
Ça pue le chrysanthème
Ils ne liront plus jamais
En nos vertes années
Y manquait plus qu' Rab'lais
Dans l'dos m'y nique jamais

Ils ne liront plus jamais
Dominique Jamet
L'était à la B. N. F.
S'était fait du bénéf'
Ils ne liront plus qu' scanné
J'en ai un peu de peine, tiens !
D'Eugène Fromentin,
Dominique ? Jamais

Entropie, c'est fini
Et dir' qu' cett' librairie en a vu des balourds
Y'avait Mickey, y'avait Minnie
Maint'nant c'est dev'nu Pearl Harbour
Kokott Dunouga y croisait Gaston Lagaffe
Mortimer et Olrik s'y sont bien pris le blair
Tintin et Milou y ont sauté au paf
Mais on en a fini avec la ligne claire

Ils ne liront plus jamais
Tom Sawyer de Mark Twain
Conte's de fées d'Bettelheim
Gombrowicz, lus ? Jamais
La fille de nulle part
Qui qu'en a quoi à carr-
Er car ces troufions
D'Amazon ont dit « Non »

Comm' disait Wittgenstein
Au pote Alain Veinstein
Dans l’fameux Tractatus
— Sur quoi faut fair’ motus — :
« Ce qu'on ne peut plus faire
Sur le boul'vard, faut l' taire »
Mais y' a plus de libraire
L'est fini, l'phalanstère

Entropie, c'est fini
Et dir' que c’tte librairie a connu d' si beaux jours !
L'utopie, c'est fini,
On n'en trouv'ra plus beaucoup alentour
Fini d'y ouïr d' drôl's de discours ou d'calembours
On n’y savourera plus l'entregent
Plus d’ trésors, de trucs rares, de trouvailles d’un jour
Plus d’apéros joyeux, ça s’ra plus comme avant

Parfois, je voudrais bien
Ma petite Lison
Te dire « Tiens, lisons
Ce livr' d'Aimé Césaire »
Mais cet ouvrag' je l'perds
Comme les anciens liens
Faut se faire un' raison
Même les âm's mortes errent

Au cent-quatre-vingt-dix-huit
Sur ce boul'vard Voltaire
Orwell va prendr' un' cuite
plus quatr’ : V’là Big Brother !…
Winston lâche l'affaire
Pour lui, ce s’ra l’hiver
Pour nous, y’aura pas d’suite  :
Terminé, l’inventaire

La philantropie, c'est fini
Et dir' qu’ c’tte librairie vendait Oh les beaux jours !,
Et Léo-nor Fini
Et, faut l'avouer, d'Henri Troyat Faux Jour
Fini d'y ouïr d' drôl's de discours ou d'calembours
Et on n’y verra plus de livr's ni de gens
Plus d’ trésors, de trucs rares, de Prince de Hombourg
Plus d’apéros joyeux, de p’tits coups d’détergent

Nous n’irons plus jamais
Il s'est fait dézinguer
L’est aboli, l’princ' ringard
Malgré ses Jean Piaget
Terminé, fermeture
C'est fini, l'aventure
Et même les bitures
Plus rien à partager

L’anthropologie, oh ! c'est fini
Et dire que cett’ conn’rie a connu d' si beaux jours !
La bouquin'rie, c'est fini,
On n'en trouv'ra plus du tout alentour
Fini d'y ouïr de beaux discours ou d'calembours
Ça arrach’ l' cœur, comm' dirait Boris Vian
Plus d’ photos de Proust en slip sur la plag’ de Cabourg
Plus d’apéros joyeux, ça s’ra plus qu’ l’eau d’Evian

Nous n’irons plus jamais
Il s'est fait dégommer
Ce curieux Ech'nozien
Il n’en restera rien
Fin d’ l'équipée ! malaise…
Pourtant c’était balèze !
Mais ça intéress’ qui,
Aujourd’hui, Cherokee ?

Entropie, c'est fini
Et dir' que c’tte librairie a connu d' si beaux jours !
La bouquin'rie, c'est fini,
On n'entrera plus qu'au pire alentour
Entropie, oh ! c'est fini
Et dir' que des amis y trouvaient des amours
Entropie, oh ! c'est fini
Ce n'est plus trop la pein' qu'on y accoure