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mercredi 29 juin 2011

À rebrousse-temps


Grâce au message d'un tiers posté sur la liste ANPR, j'ai récemment appris que le talentueux bellâtre Raphaël Enthoven — producteur (sur le départ) de l'ultime espace de philosophie sur France Culture, Les nouveaux chemins de la connaissance — avait consacré le 25 mai dernier une émission au fabuleux chef-d'œuvre de Philip K. Dick, Ubik, au cours d'une semaine dédiée à l'abordage philosophique de la science-fiction, en compagnie de Jean-Clet Martin et d'Étienne Barillier.
Ayant relu je ne sais combien de fois, malgré l'immonde couverture séveunetizes de mon exemplaire, ce roman d'une intelligence inouïe, impossible à jamais vraiment appréhender, j'ai aussitôt téléchargé l'émission et me suis mis à l'écouter.





C'était fichtrement passionnant, mais bing ! à partir de la vingt-troisième minute et demie ça s'est mis à déraper en bouillie, et voilà que trente secondes plus tard on revenait au point de départ, au début de l'émission…

Il se trouve que dans la nuit du 30 au 31 mai dernier (soit cinq jours après la diffusion de l'émission consacrée à Ubik), un incroyable cafouillage cacophonique s'est produit sur cette antenne, sans doute en raison du dégraissage des techniciens auparavant en charge de surveiller le bon déroulement des retransmissions.
Rapport de Jacques "Duhamel-radiophile", membre de la liste ANPR :

Ce qui s'est passé ces 37 dernières minutes en direct au moment même où j'ai commencé à écrire est bien un moment de radio ou plutôt d'abandon d'antenne.
Pendant une longue demi-heure, en ce tout début de nuit du 31 mai 2011, se mélangent la diffusion de l'émission de Christine Goëmé
[« L'éloge du savoir »] et celle des « Nuits de France Culture » (ironie, alors qu'on a droit à un jingle rappelant à l'auditeur distrait ou particulièrement réfractaire au changement que les Nuits démarrent désormais à 1h00 du matin), en une semi-cacophonie, d'où émergent cependant le déroulé du neuvième volet de la conférence de Pierre Rosanvallon sur l'essence de la société démocratique, et une « Nuit magnétiques » d'Alain Veinstein consacrée à la Goutte d'Or.

Voici le mic-mac en question, précédé par la fin de l'actuelle émission du même Alain Veinstein, juste plus vieux de trente-deux ans (bon courage pour l'écoute !) :



Et ledit Jacques d'ajouter malicieusement :

Il est savoureux d'extraire de cette dernière (c'est la bande-son Nuits magnétiques qui l'emporte, en termes de volume sonore) vers la dixième minute, les propos de Veinstein. En préambule à son exploration de la Goutte d'or, « un haut lieu du parisianisme et du private joke » (sic !) le grand Veinstein fait allusion à l'actualité politico-médiatique du moment (22 octobre 1979) en faisant profession d'indépendance car, dixit : « ici-bas d'où nous vous parlons, nous n'avons ni le désir de gouverner les circonstances, ni de planifier les idées » ; et celui-ci donc de faire la promesse suivante : « confier nos émissions au petit bonheur de faire une radio… au petit bonheur, car le petit bonheur, chers auditeurs c'est la vie ! »

Étant au courant de ce plantage inédit dans l'histoire de la station, c'est assez naturellement que j'ai songé hier, en constatant la bizarrerie en plein milieu de l'émission d'Enthoven, à un cafouillage du même type.
J'en ai fait part à la liste ANPR, et voici une sélection des échanges qui s'en sont ensuivis hier après-midi, sous une chaleur suffocante, après que j'ai récupéré l'émission grâce aux bons soins de Laurent Duval :

GEORGE WF WEAVER :
Merci, Laurent, car je n'étais pas au courant de cette émission, mais il y a un petit souci : à 23'30", ça se met à causer en extra-terrestre (normal, tu me diras, vu le sujet de l'émission) durant trente secondes, et puis à 24' on revient au début.
Est-ce dû à un problème de téléchargement de ma part, ou bien c'est le fichier de départ qui est corrompu ?

FLORENT GIORDANO :
Bonjour George,
C'est un problème que j'ai eu pendant l'écoute en direct (via le player) le jour de notre rencontre (puisque la diffusion eut lieu ce jour). Peut-être était-ce une émission enregistrée longtemps à l'avance et le seul fichier diffusé fut envoyé tel quel lors de la diffusion initiale ?
Si quelqu'un en possède un bon exemplaire, je suis également preneur…
À vous

LAURENT DUVAL :
Si ça ce n'est pas une réminiscence a rebrousse-temps posthume du Maître du haut-château, je suis un nexus 5 !

FLORENT GIORDANO :
Je crois d'ailleurs me souvenir que ce que George identifie comme une voix d'extraterrestre est en fait un extrait de Twin Peaks (qui passe actuellement sur Arte) dans lequel Fincher a fait enregistrer les voix de ses acteurs à l'envers avant d'inverser le son ce qui donne une bouillie difficilement compréhensible.
Peut-être que R. Enthoven a voulu créer une émission en mise en abyme avec tous ces retours temporels…

JÉRÔME BOULAY :
Bonsoir à tous,
George, j'avais fait le même constat lors de l'écoute en direct. J'avais dû en parler ici, mais pas d'explications supplémentaires à l'époque.


GEORGE WF WEAVER :
Bonjour Jérôme,
Lorsque tu dis que c'était pareil en direct, tu écoutais en hertzien ou en numérique ?
Doit-on déceler dans ce galimatias la marque d'un quatrième stigmate de Palmer Eldrich ?

WANDA-LOU ZY :
Bon sang, c'est fort troublant ! Ou bien un technicien aux doigts palmés et ça fait moins rêver.
Oh et puis zut, optons pour la version de George !

LAURENT DUVAL :
Si je n'ai pas d'erreur en inversant les pistes, au milieu coule la voix de Raphael (inversée) avec un petit bout de la musique de L'armée des 12 singes (Piazzola, Astor). La bande originale, le technicien palmé l'a jetée sans Marker.
Juste après, il dit : "vous commencez l'emission par la fin", puis : "après tout, on ne sait où est le début, où est la fin"…

GEORGE WF WEAVER :
Je viens de réécouter attentivement : les deux débuts ne sont pas du tout identiques. Il semblerait qu'il y ait eu deux prises, et qu'à la minute 24 on retombe sur la première, où Enthoven fourche et dit "vertiginant" pour "vertigineux". Bref, un sacré micmac, presque du niveau de la diffusion simultanée de "L'éloge du savoir" et du début des Nuits avec "La goutte d'or", l'autre soir.
Donc impossible d'avoir l'émission complète…
Le plus marrant, c'est que juste après le "recommencement" de l'émission, Enthoven présente différemment le livre :
"C'est un livre étonnant, un livre stupéfiant, un livre qui laisse planer la possibilité sur son lecteur, eh bien, tout simplement de tout recommencer à zéro à la seconde où il le lit…"
Vraiment, Dick a frappé très fort d'outre-tombe ! Il avait raison, le bougre, lorsqu'il disait (dans "Ubik", précisément) : "Je suis vivant et vous êtes morts"…

GEORGE WF WEAVER :
Constatant que l'émission était toujours proposée à la réécoute, j'ai lancé le Player et téléchargé avec Flashgot : hé bien, on obtient exactement le même boustrophédon !
Tonnerre, il n'y a donc plus aucun technicien qui écoute les émissions, dans cette fichue Maison Ronde ? Voilà plus d'un mois que l'émission est proposée à la réécoute, et nul ne semble s'être aperçu de rien !

LAURENT NADOT :
J'adresse un climatique salut à tous les courageux qui lisent la liste.
J'ai peut-être quelque chose pour les Dickiens dont le temps se désarticule à force de regarder les trous de pall-mall dans le costume brouillé de Raphy sur le daguerréotype mis à notre disposition par l'ORTF (magnez-vous demain ça sera la RTF et après-demain le club d'essai).
En parlant de postes à galène je suis en pleine panade avec une de mes bécanes qui a des problèmes de refroidissement, du coup j'ai un message d'alerte récurrent, quasi-permanent , dans le genre menace d'incendie sur l'immeuble et ça fait quelques semaines que ça dure. Je n'invente rien, en gros le message c'est : "si tu m'envoies pas illico en congé-repos-maladie je m'immole par le feu et te promets un bordel dans ta cania que à côté fukushima aur l'air d'une promenade au pôle" (mais il ne dit pas lequel des deux pôles).
Pendant ce temps-là ma 2e bécane a ses vapeurs pour d'obscures raisons de disque saturé, bref la seule qui marche corrèque c'est celle qui est plus jeune et branchée en permanence sur le Net sauf qu'elle est virussée jusqu'à la racine du bus. Bref pour le dire en clair je suis un peu en rideau et un peu beaucoup.
Mais dans un moment de sécurité j'ai pu consulter mes saisies de la période considérée, et je vois que j'ai un UBIK réduit à 45' et pris sur le hertzien (comme presque toujours j'ai retiré le journal d'Adèle). Je n'ai pas bien suivi le débat sur le micmac entre les différentes versions diffusées/pas diffusées / podcastées / retirées du podcast / en ligne mais enfin si vous avez besoin de ce qui a été effectivement diffusé ce jour là, je l'ai à votre disposition.

GEORGE WF WEAVER :
T'inquiète, Laurent, ça va péter grave, on va se retrouver sous peu sous le déluge et tes bécanes récupéreront un peu de fraîcheur…
Comme Jérôme Boulay n'a pas précisé, à propos de son écoute en direct pareillement désarticulée à rebrousse-temps en attendant l'année dernière, s'il écoutait en numérique ou en hertzien, je suis preneur pour ta captation hertzienne, histoire de mettre un terme à ce mystère.
Bon courage pour tes galères, en attendant l'orage,

LAURENT (MO)NADO(LOGIE) :
Est-ce que quelqu'un a essayé d'écouter à l'envers le moment de la 24ème où Raphy fait mine d'attraper la myxomatose ?
Je crois qu'Audacity permet ça, et je serais pas surpris qu'il y ait là soit une solution, soit une énigme supplémentaire.
Entre temps je suis arrivé au passage incriminé sans me faire bouffer par Jory. Second départ aneffet, mais là il y a quand même pas mal de clins d'œil, donc je parie sur une audace formelle de Raphaël, qui a voulu se payer le luxe d'un second début en plein milieu, comme si Joe Chip et Pat Conley avaient été invités sans figurer au générique, histoire d'injecter la parano dickienne à l'auditeur en appliquant directement y appliquant directement le bordel directement le bordel le bordel directement le bordel dickien : Dick a toujours aimé faire dérailler le temps. Glarg.
Mais j'ai un petit problème : ma version hertzienne est incomplète au début because j'ai — une fois de plus — sacqué la partie "ah you know what & les onctuosités du début de discussion". Donc chez moi ça ne démarre qu'avec les pubs Orangina sur musique de fond de Brazil. Du coup j'ai du mal à dire si le second départ est copié sur le premier, mais je ne crois pas car il y a dans les deux cas un bonjourage de Raphy à ses invités. Je pense qu'il a voulu jouer avec nos nerfs et à mon sens c'est une foutue belle trouvaille de lui ou de Jean Frédéricks ou bien d'on ne saura jamais qui...
Bon je dépose ma version il y en a pour quelques minutes. Patience, Djödje…

GEORGE WF WEAVER :
Tu as raison, Laurent, je me suis fait avoir comme un bleu !
Ce bazar était volontaire, comme en témoigne la liste des commentaires sur la page de l'émission :
http://www.franceculture.com/emission-les-nouveaux-chemins-de-la-connaissance-science-fiction-35-ubik-de-ph-k-dick-2011-05-25.htm
"Foutue belle trouvaille", en effet, je ne sais de qui (Dick ?), cette adéquation de la forme et du fond.
GEORGE WF WEAVER :
Bon, l'idée semble venir d'Enthoven, puisque celui-ci déclare, juste avant que ça dérape dans un univers parallèle :
"Mais ils vivent tous, surtout, la possibilité permanente d'un reformatage total de leur cerveau, de leur mémoire, de leur esprit."
Et juste après le pseudo-cafouillage à rebrousse-temps, il balance son couplet sur le recommencement permanent, que je citais tout à l'heure…
Bon sang, je suis vraiment beaucoup trop sérieux, incapable d'imaginer de l'humour dans une émission de cet acabit !


LAURENT NADOT :

Bon, désolé : pour l'extrait à se passer à envers, c'était une fausse piste. L'influence célèbre de Paul Mc Cartney sur Raphy n'a pas été jusque là. Une fois ce petti segment retourné comme une chaussette ubicuicuitaire-piedgauche-pieddroit-atassionlegrozorteil c'est rien qu'un début usuel des NCDC, avec une musique de Tango c'est peut-être Piazzola ou Demarsan, mais peu importe. Si tout ça est une amusette de la bande à Raphy, c'est simplement l'extrait qu'ils ont été chercher pour faire la rustine de retour en arrière après coup de sang de Pat Conley.
Voici le lien vers ce qui a été diffusé ce jour-là (enfin si c'était bien ce jour là, et si c'était bien moi — ooh, je… gaspe !) :
[…]
Il manque un peu au début et j'ai aussi coupé ric-rac avant qu'ils s'embrassent à la fin, mais enfin ça aura valeur de preuve devant le tribunal.


GEORGE WF WEAVER :

Merci, je vais écouter ça à tête reposée mais l'affaire semble à présent acquise : j'ai pris des vessies pour des lanternes, désolé.
Et en plus je me suis gourançé, tout à l'heure : Enthoven annonce bien le journal d'Adèle, après le recommencement, quoique un peu plus fissa.
Si tu nous déposes le morceau retourné comme un gant (chose que je ne sais pas faire), je te file un dollar d'or de 1930…

Et presque aussitôt après cette requête, les deux Laurent de cette conversation déposaient quasi-simultanément cette fameuse demi-minute du milieu de l'émission. On l'entend ici telle qu'elle fut diffusée ce 25 mai, puis, après un silence, en sens de lecture inversé :

jeudi 23 juin 2011

Capitalisme, désir et servitude

Le capitalisme n'en finit pas de se rendre discutable. Si le spectacle n'en était pas parfois si repoussant, on regarderait presque avec admiration la performance d'audace en quoi consiste de piétiner à ce point la maxime centrale du corpus de pensée qui lui sert pourtant de référence idéologique ostentatoire ; car c'est  bien le libéralisme, en l'espèce kantien, qui commande d'agir « de telle sorte que tu traites l'humanité aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre toujours en même temps comme une fin, et jamais simplement comme un moyen ». Par un de ces retournements dialectiques dont seuls les grands projets d'instrumentation ont le secret, il a été déclaré conforme à l'essence même de la liberté que les uns étaient libres d'utiliser les autres, et les autres libres de se laisser utiliser par les uns comme moyens. Cette magnifique rencontre de deux libertés a pour nom salariat.
[…]
Les asservissements réussis sont ceux qui parviennent à couper dans l'imagination des asservis les affects tristes de l'asservissement de l'idée même d'asservissement — elle toujours susceptible, quand elle se présente clairement à la conscience, de faire renaître des projets de révolte. Il faut avoir cet avertissement laboétien en tête pour se mettre en devoir de retourner au « noyau dur » de la servitude capitaliste, et mesurer sa profondeur d'incrustation à ce que, pourtant très étonnant, il n'étonne plus personne : certains hommes, on les appelle des patrons, « peuvent » en amener beaucoup d'autres à entrer dans leur désir et à s'activer pour eux.
[…]
La vie sociale n'est que l'autre nom de la vie passionnelle collective. Évidemment sous des mises en formes institutionnelles qui font de considérables différences, mais au sein desquelles affects et forces de désir demeurent le primum mobile. Reconnaître leur caractère profondément structuré n'interdit donc pas, au contraire, de reprendre le problème salarial « par les passions », pour demander à nouveau comment le petit nombre des individus du capital parvient à faire marcher pour lui le grand nombre du travail, sous quels régimes variés de mobilisation, et avec peut-être la possibilité de tenir ensemble des faits aussi disparates que : les salariés vont au travail pour ne pas dépérir (= manger) ; leurs plaisirs de consommateurs les rachètent un peu (ou beaucoup) de leurs peines laborieuses ; certains engloutissent leur vie au travail et semblent y trouver leur compte ; d'autres adhèrent carrément à la marche de leur entreprise et lui manifestent leur enthousiasme ; les mêmes un jour basculent dans la révolte (ou se jettent par la fenêtre).
[…]
Se sentir mobilisé ou vaguement réticent, ou encore révolté, engager sa force de travail avec enthousiasme ou à contrecœur, ce sont autant de manières d'être affecté comme salarié, c'est-à-dire d'être déterminé à entrer dans la réalisation d'un projet (d'un désir) qui n'est pas d'abord le sien. Et voilà peut-être le triangle élémentaire où il faudrait resituer le mystère de l'engagement pour autrui (en sa forme capitaliste) : le désir d'un, la puissance d'agir des autres, les affects, produits par les structures du rapport salarial, qui déterminent leur rencontre. En ce lieu où l'anthropologie spinoziste des passions croise la théorie marxiste du salariat, s'offre l'occasion de penser à nouveaux frais ce que sont l'exploitation et l'aliénation, c'est-à-dire finalement d'à nouveau « discuter » le capitalisme, quoique toujours au double sens de la critique et de l'analyse. Avec aussi, à terme, l'espoir que, de discutable, le capitalisme finisse par entrer dans la région du dépassable.

Frédéric Lordon, Capitalisme, désir et servitude — Marx et Spinoza,
La fabrique éditions, 2010, « Avant-propos », passim

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Contractions, de Mike Bartlett. Une pièce radiophonique diffusée sur France Culture dans le cadre de l'émission Perspectives contemporaines samedi 11 juin 2011 :



Et voici trente ans, déjà…



mercredi 15 juin 2011

Et puis j'ai continué, comme si une rafale de vent me poussait dans le dos…


« Avez-vous lu Baruch ? ou portrait présumé de Spinoza », par M. Cohen, J. Antoine et P.-F. Moreau (Les Samedis de France-Culture, 4 mars 1978) :



Merci, Fred, de la liste ANPR !

samedi 11 juin 2011

Des livres et nous (4)


Sur le point de paraître aux dynamiteuses éditions Sao Maï :
Henriette et le Bonhomme-bobine,
de l'ineffable et insaisissable Laurent Diox

Ces terrains, ces zones de friches étaient comme les pores ouverts de la ville. C’était là qu’on entendait les nerfs, le cœur, la respiration, les sanglots, la haine de la ville remodelée, qui n’était plus qu’un corps gangrené, aux cicatrices recouvertes de béton. Un béton en allées rectilignes qui disaient où aller et comment, qu’éviter, un parcours balisé de bouées de sauvetage et de gentils îlotiers à vélo. Il en connaissait quelques-uns : cité Champagne, rue des Haies, rue des Maraîchers, rue de Buzenval, rue Pixérécourt. Il y en avait aussi à Belleville, Ménilmuche, Montreuil, Bagnolet, dans le XIIIème. Il enfila son blouson, mit la brochure dans sa poche, sortit et commença à dériver. Alors qu’il réfléchissait à la zone sur laquelle il pourrait aller, il arriva porte de Montreuil, longea le centre commercial de la Grande Porte. Et là, il tomba dessus, les palissades étaient bleues, elles cachaient l’un de ces déserts peuplés de trois pelleteuses semblant se prendre pour des palmiers. Il en fit le tour, vit un clodo endormi dans un coin de porte, à côté d’un petit bar en train de fermer. Le terrain faisait presque tout le pâté de maisons, rue Lavoisier, on y voyait les escaliers nus des anciens immeubles. Ils étaient là comme d’obsolètes prothèses sur un cadavre en décomposition. Il finit son tour et entra au Rousseau, un rade où il avait ses habitudes. Un havre de paix où l’on pouvait s’arrêter quelques instants, de longs instants même. Assis derrière les vitres à ce carrefour, rue Victor-Hugo, rue de Paris, à voir passer l’humanité bouillonnante du Bas-Montreuil. La queue à la boulangerie, les accrochages d’automobilistes, les interventions de flics. « J’étais à l’hôpital de jour et maintenant ça va mieux… », « Tiens, voilà Gene Vincent… » tout y passait. On s’y retrouvait pour manger, pour le café, le soir. Bo Diddley et le concert deSuicide,le démocratisme radical et Malaquais ; les livres qu’il faudrait lire et les albums qu’il fallait écouter. Les petits malheurs qu’il fallait dire à quelqu’un, les petites joies aussi ; comprendre calmement que de vieux différends n’avaient plus lieu d’être.


En librairie à compter du  20 juin, mais déjà à Paris à la librairie Entropie (198 Bd Voltaire, Paris XIe)

mercredi 1 juin 2011

Alerte au schtroumpfalitarisme !

Une intéressante exégèse vient de sortir aux éditions Hors Collection, sous la signature d'Antoine Buéno :



François Angelier lui consacrait ce matin
sa chronique sur France Culture :